6 questions à Sébastien Risler, CEO de Doc2u : les objets connectés peuvent-ils changer notre pratique ?

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De formation ingénieur systèmes embarqués, c’est après plus de 10 ans d’activité dans le domaine des objets connectés, de l’industrie et du médical que Sébastien Risler cofonde Doc2u en septembre 2020. Entouré de médecins et d’experts du domaine, il est convaincu des bénéfices de la télémédecine.

Le 16 décembre 2021, il intervenait auprès de la communauté médicale de Medaviz pour répondre à leurs questions sur les objets connectés.  

Quels sont les principaux objets connectés ?
Pouvez-vous nous présenter des cas d’usages ?
Comment les objets connectés sont-ils intégrés à la téléconsultation ?
Quels sont les avantages et les freins des dispositifs médicaux ?
Avez-vous des conseils pour la mise en place de ces objets ?
Quelles sont les spécificités de Doc2u ?

Quels sont les principaux objets connectés ? 

Sébastien Risler :  Il est tout d’abord important de définir ce qu’est un objet connecté : “un matériel capable de recevoir et d’envoyer des informations via Internet.” Il y a eu une explosion de ce type de dispositifs depuis les années 2000, couplée avec l’émergence des infrastructures de télécommunication comme les réseaux Wifi à domicile dans les années 2000, les réseaux cellulaires de type 3G à partir de 2005, puis les smartphones en 2010, qui sont eux aussi des relais de réception et de transmission des données. 

Cet engouement pour les objets connectés est multisectoriel. Il est présent notamment dans l’industrie, qui utilise les objets connectés pour remonter des mesures et contrôler des infrastructures, faire de la maintenance prédictive ou réactive. Le domaine de la santé s’est intéressé un peu plus tardivement aux objets connectés, mais dispose désormais de nombreuses applications : du robot chirurgical assisté à distance à la mesure de constantes à domicile, en passant par le pacemaker ou les objets de détection des chutes pour les personnes âgées. 

Leur socle commun reste une réglementation européenne spécifique, qui attribue un marquage CE Dispositif médical. Cela implique qu’un organisme indépendant a vérifié le dispositif, sa qualité et sa sécurité, notamment la précision de ses mesures.  

Pouvez-vous nous présenter des cas d’usages ? 

Sébastien Risler : Les dispositifs médicaux sont utilisés par la télémédecine qui présente 5 domaines : la téléconsultation, la téléexpertise, la téléassistance, la télésurveillance et la réponse médicale. C’est par la télésurveillance qu’ils sont arrivés, notamment pour le suivi de patients atteints de maladies chroniques, comme l’hypertension ou le diabète. Ils permettent de stocker des données et de les transmettre instantanément aux professionnels de santé. L’enjeu est aussi de rendre le patient autonome dans sa prise de mesures, pour qu’il puisse constater et partager ses informations en temps réel, dans le cadre d’une téléconsultation par exemple. 

Des objets connectés plus complexes vont permettre l’auscultation, comme le stéthoscope (qui envoie un flux audio en temps réel ou en asynchrone), l’otoscope ou l’ECG.  Ils apportent un autre avantage, celui de la numérisation de la donnée brute ou complexe grâce au calcul d’indicateurs. Ils vont enrichir la donnée médicale à des fins de détection ou de diagnostic, ce qui nous rapproche de l’intelligence artificielle, notamment pour l’imagerie. Pour ces dispositifs, il est nécessaire d’avoir une interprétation par un professionnel de santé. 

Et les objets connectés ne sont pas les mêmes dans le cadre d’un suivi à distance via une télésurveillance ou d’une téléconsultation avec le relevé des constantes en temps réel. Il existe des cas encore plus complexes avec le recours à un logiciel compatible, comme dans un acte de téléexpertise. Le patient est alors assisté par un professionnel de santé pour la prise de mesures, qui sont enregistrées puis transmises à un ou plusieurs praticiens pour interprétation. 

Comment les objets connectés sont-ils intégrés à la téléconsultation ? 

Sébastien Risler : Dans ce cadre plus spécifique, les dispositifs proposés sont rarement des dispositifs unitaires. Les fabricants ont tendance à les rassembler pour répondre aux besoins d’un acte de médecine générale par exemple. 

Ils se retrouvent sous différentes formes, comme les bornes ou les cabines qui sont les plus connues et des versions plus mobiles existent pour accompagner les infirmiers sur un territoire donné. Ils doivent faire partie d’une organisation, comme les CPTS, dans lesquelles les praticiens sont équipés pour les téléconsultations assistées avec un médecin. Ils sont intégrés en amont du déploiement, pour jouer un rôle défini dans le parcours de soins et dans la pratique.          

Quels sont les avantages et les freins des dispositifs médicaux ? 

Sébastien Risler : Le premier avantage est évident : avoir accès aux patients à distance, pour des raisons d’économies de déplacements ou de répartition de la charge médicale sur plusieurs ressources. L’objet connecté va apporter de la donnée en temps réel ou des données plus exhaustives sur un temps long, prises dans un environnement plus proche des conditions de vie pour éviter l’effet blouse blanche. 

Il existe des freins et des points à améliorer, qui sont liés aux nouvelles technologies. Il faut gagner la confiance et elle passe par la fiabilité, comme par la vérification du marquage CE Dispositif médical sur la solution utilisée. Il est tout aussi important de faire oublier l’aspect technique de ces outils pour faciliter leur appréhension par les patients. L’intégration dans la pratique et les parcours, la compatibilité dans l’écosystème numérique ainsi qu’un modèle économique pertinent sont les autres points à prendre en compte.    

Avez-vous des conseils pour la mise en place de ces objets ? 

Sébastien Risler : Il faut commencer par l’adoption de la téléconsultation au sens général du terme, pour être équipé et posséder un minimum de culture digitale. Quant aux objets connectés, il faut savoir qu’ils existent, ce qui n’est pas évident. Je pense aussi qu’il nous revient, aux fabricants et aux éditeurs de logiciels, de faciliter les choses. Lorsque quelqu’un a eu recours à la téléconsultation par obligation pendant la crise Covid et souhaite revenir à son activité précédente, nous devons proposer plus que des objets : un système qui permette aux praticiens de piloter le dispositif de façon simple et transparente. 

Quelles sont les spécificités de Doc2u ? 

Sébastien Risler : Nous avons conçu un dispositif médical dédié à la téléconsultation, en essayant d’adresser les freins et de les lever. Nous avons regroupé l’ensemble des objets nécessaires à une consultation par un médecin généraliste dans un seul produit, soit 5 outils pour 6 paramètres. Ils permettent de prendre des constantes de rythme cardiaque, la saturation en oxygène, la température, la tension artérielle, d’utiliser un stéthoscope et un otoscope qui s’intègrent dans les plateformes existantes et les solutions telles que Medaviz. L’objectif était de proposer un produit très facile à utiliser pour le patient et le praticien. Et pour préserver la pratique, nous avons voulu que le professionnel de santé soit au contrôle de chacun des actes, en démarrant les instruments et en choisissant de partager la donnée avec le patient, pour se retrouver dans la même position que dans son cabinet.